I must be kiddin' you

Il est sympa, vraiment. En tout cas je l'aime bien. Son nom, c'est Henri.
Il est plutôt bien habillé, on dirait un majordome ! Il a les cheveux mal taillés, par contre. Mais c'est parce qu'il n'aime pas tellement que l'on touche à ses cheveux. Alors il les coupe lui même. Mais comme il le dit si bien : "Moi j'suis réceptionniste, pas coiffeur !" Enfin il l'était. Quand il était plus jeune, Henri avait des cheveux longs. Ils étaient entre le brun et le blond. Un peu comme moi, mais plus foncés.

Parfois, il est en triste, Henri. Alors il a le regard vide. Et je m'apperçois qu'il est en train de mordre l'intérieur de sa lèvre inférieur. C'est un peu un tic, je crois, quand il est nostalgique de sa vie d'avant... De sa vie, en fait. Je n'arrivais pas tellement à comprendre pourquoi est ce qu'il était resté là, mais plus j'apprend à le connaitre, mieux je le comprend.
Il avait de sacrés rêves, le Henri. Il voulait dev'nir marin ! Mais il a pas osé.
Il voulait s'marier ! Mais il a pas osé.
Il aurait aimé avoir des enfants, le vieux ! Ben ouais, mais... 
Il était impuissant. 
"Ha, ça arrive à des gens biens !" : C'est c'que j'lui avais répondu,
quand il s'est confié.
Ca va, il l'a bien prit.
On rigole bien, avec Henri.
Souvent, je me pose et je l'observe. Il lui arrive encore de vouloir essuyer le bord du comptoir avec son coude.
Parfois, il me criait dessus parce que je posais une une tasse sale sur la table.
Et puis si mon travail était bien fait, selon ses codes et ses principes,
il me disait qu'il m'aimait bien. 
J'avais envie de lui dire :
Moi aussi, j't'aime bien, Henri !

J'ai jamais osé.